Publié le mardi 9 février 2021 par Guillaume COMONT - Rédacteur en chef dans la rubrique Actualités 2021.

Si cette période hivernale nous éloigne quelque peu de l’émission, elle n’en est pas moins riche concernant le Fort lui-même. L’édifice, totalement achevé en 1866 (avec son brise-lames au nord et son havre d’abordage au sud), vieux d’un peu moins de deux siècles aujourd’hui, est au centre des préoccupations du Conseil départemental (général auparavant) de la Charente-Maritime, propriétaire du Fort, qui doit en assurer l’entretien et surtout la pérennité depuis 1988. Un deal conclut autrefois entre Jacques Antoine (représentant de la société de production en charge de l’émission) et le département. Ce dernier avait accepté de racheter le Fort pour un franc symbolique à l’inventeur de Fort Boyard, qui avait aussi exigé en retour un bail exclusif des lieux afin de tourner les numéros de sa nouvelle émission de télévision Les Clés de Fort Boyard, qui verra le jour le 7 juillet 1990 sur Antenne 2. Un échange « gagnant-gagnant » qui perdure et pour cause ! Le département tire énormément de recettes touristiques avec le succès de l’émission télévisée aussi bien en France qu’à l’étranger.

Seulement, avoir la charge d’un monument historique classé depuis 1950 impose de nombreux travaux, surtout quand ledit bâtiment de pierre se trouve au milieu de l’océan Atlantique entre les îles d’Aix et d’Oléron.

Le 24 décembre dernier, à quelques heures de Noël, le journal Le Littoral (lire l’article en cliquant ici !) a été le premier à officialiser la volonté du Conseil départemental de la Charente-Maritime de réaliser des travaux d’ampleur à proximité immédiate du Fort à l’horizon 2023. Et pour ce faire, le quotidien Sud Ouest en date du 6 février 2021 (lire l’article en cliquant ici !) nous précise lui qu’un bureau d’études avait été mandaté par le département l’automne dernier « pour modéliser le Fort afin de reproduire les effets de la houle, du ressac et des vagues. Et livrer des scénarios afin de le protéger des assauts de la mer, qui le mine et creuse les pierres ». Ces scénarios devaient permettre de réfléchir à des aménagements pour préserver le site classé, le cas échéant. Il semblerait que ces premières études aient conduit le Conseil départemental à prendre les devants.

Et on s’achemine bien vers des travaux d’ampleur, c’est bien le mot, car si d’autres chantiers ont été opérés ces dernières années dans et autour du Fort (remplacement de la passerelle en bois du 1er étage en 2004 et 2014, nouvelle structure pour la vigie en 2011, remplacement de la plateforme off-shore permettant d’accéder au Fort en 2015, réfection de la plateforme hélicoptère sur la terrasse du Fort en 2018...), ceux qui attendent le Fort à moyen terme seront bien plus titanesques que tout ce qui a été fait auparavant.

 HORIZON 2023 : PROJET DE RECONSTRUCTION D’UN BRISE-LAMES ET D’UN PORT DE DÉBARQUEMENT

La majorité des téléspectateurs l’ignore, mais la physionomie du Fort a changé depuis son achèvement au XIXe siècle.

Alors que le Fort est achevé dès 1859, deux problèmes majeurs sont constatés par les premiers soldats qui occupent les lieux : d’abord la violence du courant et des vagues qui viennent terminer leur course dans la cour intérieure du Fort, pourtant protégée par des murs d’enceinte de 20 mètres de haut. Et ensuite les difficultés pour accoster à l’édifice en empruntant le seul escalier présent le long de la façade ouest du Fort, ce qui n’était pas sans danger en cas de forte houle. Il est donc très vite acté une dernière phase de travaux afin d’édifier un brise-lames sous forme d’éperon vers le large, côté nord-ouest du Fort et un havre d’abordage comportant trois jetées vers le sud-est, en bas de la vigie, et appelé parfois « barachois » dans des documents de l’époque. D’après Les Cahiers d’Oléron consacrés à Fort Boyard, ce terme d’origine indienne « désignait, en France, un port d’accès difficile, bordé de rochers et découvrant à marée basse ». La construction, en six ans, de ces deux éléments de protection et d’accès maritimes, indispensables à la pérennité du Fort, met un terme définitif le 6 février 1866 au chantier titanesque du Fort Boyard désormais pleinement opérationnel.

Seulement, après le déclassement du Fort en 1913 (qui met un terme à son entretien, très coûteux, estimé à plus de 500 000 euros depuis 1867), au fil des décennies et en moins d’un siècle, le brise-lames au nord et le havre d’abordage au sud ont subi les assauts répétés du vent et de la houle, qui ont finalement eu raison des deux ouvrages, achevant de les éroder et de les détruire presque totalement dans la deuxième moitié du XXe siècle.

Aujourd’hui, seuls les plans de l’époque et quelques photographies prises pour orner des cartes postales touristiques du début du XXe siècle nous permettent de visualiser ces formidables ouvrages, ainsi que la silhouette originelle du Fort. Des ouvrages que le Conseil départemental aimerait donc faire revivre, afin de protéger le Fort, comme à l’époque, des vagues, de la houle et autres pépins météorologiques. Car ces dernières années, le Fort a été malmené par les tempêtes, dont l’une des dernières en date, la tempête Yukon du 8 mai 2019, a même valu au Fort quelques huisseries et vitres endommagées, entre autres.

Dans Le Littoral du 24 décembre, Sylvie Marcilly, vice-présidente du Conseil départemental de la Charente-Maritime, en charge des Affaires économiques, se voulait rassurante : « [Le Fort] ne va quand même pas s’écrouler de suite ». Il faut dire qu’il est surveillé de près comme le précise le quotidien Sud Ouest : « Comme tous les ans, mi-mars, avant l’enregistrement des émissions de jeux pour France 2 et les chaînes étrangères, des techniciens du Département prennent possession du Fort et examinent l’édifice : au-delà des volets battants et de quelques pierres descellées, ce sont des microfissures qui sont scrutées à travers une trentaine de témoins répartis sur le vaisseau de pierre ». Patrice Acquier, le directeur de l’Immobilier au Conseil départemental de la Charente-Maritime, se veut lui aussi rassurant : « Depuis quatre ou cinq ans, ils n’évoluent pas [...] mais on n’est pas à l’abri d’un phénomène météorologique majeur. » Le quotidien Le Littoral de son côté nuance « [...] [Le Fort] est, toutefois, en danger. Et son avenir a été inscrit dans le cadre de l’accord départemental du plan de relance, récemment signé entre l’État et le Département. Ainsi, en 2021 et 2022, il s’agira de réaliser des travaux de restauration et des études. Il est déjà acté que l’État participera à hauteur de 810 000 euros. Sera également étudiée la possibilité d’inscrire l’opération globale autour de la restauration de Fort Boyard dans le contrat de plan État-Région 2021-2027. Car il ne s’agit pas seulement de restaurer l’édifice. L’idée est bien de le protéger durablement ».

Sylvie Marcilly évoque alors officiellement la question de la reconstruction d’un brise-lames et d’un havre d’abordage : « Autrefois, [le Fort] bénéficiait d’un brise-lames qui le protégeait, ainsi qu’un petit port. Mais au fur et à mesure du temps, ces ouvrages ont été totalement détruits par la mer. L’idée est de recréer cet éperon afin de casser la dynamique de la houle. Une étude de faisabilité est en cours ».

Le quotidien Sud Ouest, qui a interrogé l’ancien conservateur du Musée de la marine de Rochefort, Denis Roland, rappelle par ailleurs que le premier projet de brise-lames au XIXe siècle avait dû être modifié. Il devait être, en principe, éloigné de plusieurs mètres du Fort et prendre la forme d’un chevron, alors qu’il a finalement été collé à lui et a pris la forme d’un éperon.

En effet, d’après Les cahiers d’Oléron consacré au Fort Boyard, « en 1864, la Marine décide de remplacer le brise-lames par un éperon s’appuyant sur la base [des fortifications] et le long duquel la houle va se diviser sans déferler. En même temps, les jetées du havre sont prolongées à 30 mètres et une digue, enracinée sur la jetée ouest, viendra refermer l’abri ainsi constitué [...] Le 6 février 1866, Courbebaisse, directeur des travaux hydrauliques du port de Rochefort, signe enfin le procès-verbal d’achèvement, qui marque véritablement la fin de la construction de Fort Boyard. Alors, les paquets de mer n’ébranlent plus le Fort et les grosses déferlantes ne le coiffent plus de leurs gerbes écumantes. Les navires peuvent accoster dans le port, appelé barachois dans certains documents de l’époque. La digue communique avec le rez-de-chaussée et des grues permettent de hisser les charges vers les étages. »

Si la première phase de restauration 2021-2023 est chiffrée pour le moment à trois millions d’euros, le coût de la construction d’un brise-lames et d’un petit port sera bien plus élevé, une estimation de « près de 30 millions d’euros » est avancée prudemment par Sylvie Marcilly, aussi maire de Fouras. Mais le bénéfice en serait double : protéger le Fort de la houle et permettre d’y accoster plus facilement, en ne dépendant plus de la plateforme off-shore, seule solution aujourd’hui pour accéder en toute sécurité au site via une grue. Une plateforme d’une durée de vie d’environ 20 ans, qui a déjà été remplacée une fois, en 2015. À moyen ou long terme, si l’émission venait à s’arrêter, le Conseil départemental pourrait, avec ce petit port, permettre à certains bateaux de débarquer des touristes pour visiter les lieux, une chose totalement impossible aujourd’hui, pour des raisons de sécurité (pour pénétrer dans le Fort actuellement, la seule solution est de s’agripper à un panier de transbordement, lui-même soulevé par une grue jusqu’à la plateforme, rendant impossible l’accès aux enfants et au grand public en général). Une manière aussi d’assurer un avenir radieux au monument en permettant, grâce aux paiements des visites, d’entretenir et de restaurer l’édifice... Et de contenter les nombreux Français et étrangers qui rêvent depuis toujours de pénétrer ce lieu historique, mythifié par la télévision.

Mais pour l’heure, ces projets doivent encore être examinés par les élus qui « devront trancher entre plusieurs plans, qui vont ’de la réfection à l’identique de ces ouvrages à l’introduction d’éléments techniques plus modernes’ » précise Mathieu Barbier de la Direction de la mer du Département. Opteront-ils eux aussi pour un brise-lames en éperon de forme triangulaire en pierre ? L’avancée des techniques maritimes contemporaines pourrait aussi les conduire à d’autres solutions peut-être plus souples et plus pérennes, mais qui devront naturellement s’inscrire dans le paysage et sauvegarder l’esthétique du site, déjà entravée aujourd’hui par la plateforme off-shore bouchant en partie la vue sur la façade ouest, raison pour laquelle la majorité des touristes se prennent en photo au niveau de la façade est, totalement dégagée.

Mais en attendant la prise de décisions dans les mois à venir et le début de ce grand chantier d’ici 2023, la phase de travaux qui s’ouvre pour 2021-2022 s’avère également prometteuse.

 2021-2022 : RÉFECTIONS DU PROSCENIUM ET DE LA PASSERELLE DU PREMIER ÉTAGE

En effet, le quotidien Sud Ouest révèle également que dès la fin des tournages étrangers de Fort Boyard, à la fin du mois de juillet de cette année, et jusqu’au printemps 2022 (avec une pause en décembre 2021 et janvier 2022), la passerelle du premier étage en bois va être entièrement remplacée (comme ce fut déjà le cas en 2004) et « sera soutenue par des structures plus adaptées à l’environnement marin ». Les poutres métalliques actuelles se sont oxydées en vingt ans et nécessitent un remplacement. Les éléments de remplacement choisis seront cette fois en inox galvanisé et thermolaqué et l’ossature en bois de la coursive sera plus résistante aux intempéries, clarifie le quotidien.

Le proscenium (qui a servi de plateau pour les candidats lors de la saison 2020 devant la Salle du Trésor) va également subir un lifting en règle.

Le montant total des travaux est estimé à 880 000 euros.

 LA PRESSE EN PARLE

Nous vous proposons de lire les articles principaux consacrés à futurs travaux.

• « Le Littoral » n°5796 (édition du jeudi 24 décembre 2020) :

• « Sud Ouest » (édition du samedi 6 février 2020) :

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