« Willy Rovelli m’a particulièrement aidé, notamment pour écrire mes textes »
Publié le jeudi 7 août 2014 par Interviews 2014.
dans la rubriqueC’est le dernier arrivé à Fort Boyard et pourtant il fait déjà beaucoup parler de lui. Magicien un brin excentrique au style décontracté et aux tours originaux, il reçoit chaque semaine du haut de sa vigie, que lui a cédée le Père Fouras, un candidat dont la tâche est de trouver l’astuce du tour présenté. Tout droit venu de sa contrée québécoise – comme son accent peut en témoigner – casquette rouge vissée sur la tête et costume d’étudiant un brin froissé, il ne se laisse jamais impressionner par les vedettes qui défilent dans sa tour et qui pour la plupart lui sont de toute façon inconnues. Talent montant dans l’univers très concurrentiel de la magie, il revendique sa touche personnelle qui se résume dans l’alliance savante de l’humour et de la magie, un exercice qu’il a su mettre à profit sur le Fort. Révélation du célèbre festival Juste pour rire en 2009, sa popularité ne cesse de croître d’année en année, à tel point que la production de Fort Boyard l’a repéré. Dernièrement, il participait au Comedy strip aux côtés d’autres jeunes artistes qui montent comme Vérino, Donel Jack’sman ou encore Baptiste Lecaplain. De retour chez lui avant de repartir pour la France courant septembre pour rejoindre Arturo Brachetti, il a accepté de répondre à nos questions en toute simplicité et de revenir bien sûr sur son expérience à Fort Boyard. Entretien avec un jeune homme passionné.
Fort Bavard : Comment avez-vous été recruté pour participer à Fort Boyard ?
Vincent C. : C’est par des vidéos sur Internet que la production m’a repéré. Je n’ai pas fait de casting particulier, ils ont aimé et ils m’ont pris directement. Je leur ai envoyé d’autres vidéos par la suite. Les choses se sont faites rapidement.
Fort Bavard : Êtes-vous un fidèle téléspectateur de l’émission ?
Vincent C. : Je regardais bien sûr l’émission quand j’étais plus petit, mais depuis elle avait été supprimée au Québec. Dernièrement, elle est revenue, mais mes nombreuses occupations ne me laissent pas vraiment le temps de la suivre en direct à la télévision.
Fort Bavard : Le personnage du Magicien existe depuis la création du jeu en 1990. Connaissiez-vous ce personnage et l’épreuve du bonneteau ?
Vincent C. : Je connaissais le personnage du Magicien, car dans la version québécoise, si ma mémoire est bonne, on le voyait dans l’épreuve du Bonneteau manipuler des gobelets. J’ai aussi le souvenir du Magicien avec un jeu de cartes… Je connaissais un peu le rôle, mais je suis certainement moins incollable que vous !
Fort Bavard : Avant d’arriver sur le Fort, la production vous-a-telle convoqué pour de petites démonstrations ?
Vincent C. : Avant d’arriver sur le Fort, j’avais déjà bricolé des tours, et avec la production nous avons fait une sélection de ceux qui seraient les plus adaptés au contexte de l’émission. La production a pu aussi s’appuyer sur des vidéos de mes tours. Il était nécessaire de travailler en amont dans la mesure où j’allais avoir besoin d’un certain nombre d’accessoires pour mener à bien mes tours et pour proposer des réponses aux candidats. Pour le reste de la mise en scène, cela s’est fait sur place.
Fort Bavard : Quels conseils la production vous-a-telle donné pour interpréter votre rôle ?
Vincent C. : La production m’a laissé le champ libre, j’avais carte blanche pour improviser. Il fallait juste que j’adapte mon langage, en n’étant pas trop familier dans le contexte d’une émission familiale. Si j’avais préparé quelques tours en amont, en revanche, il me restait à écrire les scénarios de présentation et quelques répliques pour donner vie au personnage. Je n’ai vu ma tenue que trois jours avant les tournages, il fallait donc que je m’en inspire ensuite et que j’endosse vraiment le costume. Contrairement à ce que j’avais pu penser au départ, la production ne m’a pas vraiment freiné et m’a laissé faire des tours que je n’aurais pas forcément pensés envisageables dans une émission de prime time destinée au grand public. Ce qui démontre que les Français sont des gens tout à fait ouverts et peuvent supporter des choses qui sortent de l’ordinaire.
Fort Bavard : Qu’avez-vous ressenti en arrivant pour la première fois sur le Fort ?
Vincent C. : Pour moi c’était un rêve d’enfant. Plus jeune, j’ai toujours aimé les sensations fortes, j’étais sportif et toujours prêt à tenter des choses qui sortent de l’ordinaire. Intégrer l’émission et arriver ensuite sur le Fort a été comme l’accomplissement d’un rêve. Le seul regret que j’ai c’est que je n’ai pas pu tester les épreuves cette saison, car j’ai été trop accaparé par la préparation de mes tours. J’espère que ce n’est que partie remise.
Fort Bavard : Comment avez-vous été accueilli sur le Fort ?
Vincent C. : Très bien ! Le travail sur un plateau comme Fort Boyard est exceptionnel. Tout le monde ici est solidaire, prévenant et chaleureux. Willy Rovelli (qui interprète un Cuisinier déjanté depuis 2012 NDLR) m’a particulièrement aidé, notamment pour écrire mes textes. Il faut dire que le fait d’être en plein milieu de la mer et de ne pas pouvoir partir comme on le souhaite crée indéniablement des liens. À Fort Boyard on a l’impression d’être en famille, pas entre collègues. Je n’avais jamais ressenti cela sur aucun autre tournage auparavant. C’est une ambiance saine et une sensation unique.
Fort Bavard : Avez-vous imaginé les tours spécialement pour Fort Boyard où sont-ce des tours que vous effectuez sur scène ?
Vincent C. : La quasi-totalité des tours que j’effectue sur le Fort sont des créations spécifiques pour l’émission, mis à part le tour avec le Rubik’s Cube qui est un de mes tours récurrents sur scène. J’ai déjà fait également le tour avec l’aiguille dans le bras que j’avais montré à Sébastien Chabal. Pour tout le reste, c’était une première !
Fort Bavard : Où puisez-vous votre inspiration ?
Vincent C. : Tout simplement de livres grand public qui permettent d’apprendre la magie, et que chacun peut se procurer ! Je lis et je prends des idées, en les adaptant à ma sauce. Parfois des idées me viennent et j’essaye d’en faire un tour. Mais je souhaite impérativement que mes tours restent accessibles et surtout, je ne veux pas révéler les trucs des magiciens. Comme vous le savez, beaucoup de magiciens voient d’un très mauvais œil le fait qu’on dévoile les astuces du métier. Aussi, tous les tours que j’effectue sur le Fort sont des tours grand public, facilement imitables à la maison, et qui ne révèlent aucun grand secret.
Fort Bavard : Votre Magic Academy prend place dans la vigie, occupée auparavant par le Père Fouras. N’est-ce pas compliqué de tourner dans ce lieu exigu à quelques centimètres du candidat ?
Vincent C. : Vous faites bien de poser la question, car contrairement à ce qu’on pourrait penser, la Vigie est un lieu très étroit et y faire de la magie n’est pas si simple ! Le principal problème vient de la prise au vent. L’air circule continuellement en vigie et il y fait très froid. Ce qui fait que j’ai même dû abandonner certains tours qui devenaient infaisables à cause du vent. Par exemple, j’avais prévu un tour avec une paille qui tourne toute seule autour du culot d’une bouteille, mais j’ai dû l’abandonner. Pour le tour du Ballon infernal que vous avez vu avec Sébastien Chabal, cela n’a pas été évident non plus, il a fallu faire usage de brûleur pour parvenir au résultat escompté. Par ailleurs, nous sommes très nombreux dans la vigie. À l’écran, on ne voit que le candidat et moi et de temps en temps Passe-Muraille, mais en réalité il y a trois caméras et le nombre de caméramans qui va avec et un accessoiriste. Sans compter que suivant mon positionnement, en étant aussi proche du candidat, il y avait un risque pour que l’on perçoive un défaut du tour, notamment quand je me mettais un peu en biais pour bien être sous l’angle d’une des trois caméras. Bref, c’est un lieu magique, mais où les contraintes techniques sont nombreuses et il faut s’adapter en faisant du sur-mesure. On ne se rend pas compte de tout cela quand on suit l’émission, mais sur place c’est une autre histoire.
Fort Bavard : Vous avez fait face à des célébrités françaises. Connaissiez-vous certaines d’entre elles ou étaient-ce toutes des personnes inconnues pour vous ?
Vincent C. : À part Booder, que j’avais croisé lors d’un spectacle et Vérino que j’avais rencontré dans le cadre d’un gala de Juste pour rire il y a deux ans, je ne connaissais aucune vedette, que ce soit Évelyne Thomas, Sébastien Chabal ou Emmanuelle Boidron. Pour moi c’était des personnes comme les autres. Pour tout dire, cela a été un mal pour un bien, car cela m’aurait ajouté un stress supplémentaire de les connaître personnellement. Là, je pouvais me concentrer sur mes tours, et comme c’était la première fois que je les faisais pour la grande majorité, le stress de leur mise en œuvre était bien suffisant ! Même si je n’étais pas en direct, il était impératif que je parvienne en une prise au résultat pour garder les effets de surprise et la spontanéité des candidats.
Fort Bavard : Au Québec Fort Boyard est de retour avec succès depuis l’an dernier. Vous a-t-on proposé d’intégrer cette version dans laquelle opère déjà le Père Fouras ?
Vincent C. : Pas encore, mais autant vous dire que j’adorerais. Pour le moment, personne ne m’a contacté, mais je pense qu’ils attendent de toute façon de voir si le taux d’écoute est suffisant avec la nouvelle saison qui sera diffusée cet hiver. Je pense que mon personnage pourrait bien s’adapter à notre version, d’autant que la vigie n’est plus utilisée chez nous non plus.
Fort Bavard : Votre rôle est très apprécié des fidèles de l’émission, chacun s’accorde à dire que vous avez révolutionné le rôle du Magicien, en proposant des tours originaux. Vous verra-t-on l’année prochaine ?
Vincent C. : Je suis content que vous m’en parliez, car j’ai très peu de retours sur le ressenti des Français quant à mon rôle dans l’émission. Ce que vous me dîtes me fait très plaisir et me donne l’espoir de revenir l’année prochaine dans l’émission. Je ne vous cache pas que j’aimerais vraiment renouveler l’expérience. D’ailleurs, si je reviens, maintenant que je connais bien le lieu et le fonctionnement, je serai à même de proposer des choses encore plus novatrices et bien adaptées à la vigie.
Fort Bavard : Vos spectacles sont-ils aussi décalés que ce que vous faites à Fort Boyard ?
Vincent C. : Je suis très malléable, je m’adapte à tous les publics. La preuve, pour Fort Boyard, je n’ai pas proposé réellement ce que je fais sur scène. Car dans mes représentations, j’ai souvent un langage plus fleuri, sans jamais être vulgaire toutefois. Mes spectacles parlent de la vie quotidienne, celle de tous les jours, de sujets de société vécus par tout un chacun, mais qui nécessitent souvent une petite expérience pour les comprendre. Par conséquent, ils s’adressent plus à des personnes âgées de 13 ans et plus. Non pas que les plus jeunes ne peuvent pas venir, mais il y aura forcément des choses qu’ils ne comprendront pas bien. Il y a aussi quelques séquences sanglantes, mais rien de bien méchant, je me rapproche un peu sur ce point de l’univers de La famille Addams, cela reste soft. Quant à moi, sur scène, je ne me prends jamais au sérieux, j’aime rester proche du public. Je suis moi-même et je ne crée pas un personnage spécifique. Je pense que c’est ce qui me différencie d’autres magiciens. Dans le métier, je me rapproche beaucoup d’Éric Antoine, que je connais bien et que j’apprécie. Il a ce grain de folie que j’aime. Nous sommes différents, mais complémentaires, car lui joue le rôle d’un personnage totalement déjanté, tandis que moi je suis plus spontané, bien que je peux vous dire que je ne manque pas non plus de fantaisies !
Fort Bavard : Aimeriez-vous participer à d’autres émissions de divertissement, comme Le Plus Grand Cabaret du Monde de Patrick Sébastien ?
Vincent C. : Bien sûr ! Je suis prêt à me confronter à tous les publics, et à adapter mes tours s’il faut. Je pense que Fort Boyard va m’apporter une certaine notoriété en France et si cela peut me permettre d’améliorer ma visibilité, c’est une très bonne chose. J’adorerai aussi venir un jour sur le plateau de Vivement Dimanche de Michel Drucker pour leur montrer de quoi je suis capable.
Fort Bavard : Après votre participation à Fort Boyard, beaucoup de Français vont vouloir apprécier vos talents en direct. Où pourra-t-on vous voir prochainement en France ?
Vincent C. : Je serai au théâtre du Palais Royal à Paris dans le spectacle Comedy Magik Cho entre le 23 septembre et le 2 novembre 2014 aux côtés d’Arturo Brachetti. Je réaliserai deux tours en solo et participerai à trois autres tours avec des camarades. Ce spectacle allie savamment humour et magie, ce qui est mon registre de prédilection. Plus tard, on pourra aussi me retrouver au Théâtre de Dix Heures à Paris où j’espère pouvoir me produire bientôt avec mon propre one man show. Je vais aussi partir en tournée en Suisse et Belgique. Je n’oublie pas mon pays, auquel je suis très attaché, mais je trouve aussi passionnant de jouer dans toute la francophonie, c’est une expérience qui me plaît énormément et que je compte renouveler dès que j’en aurai l’occasion.
Interview réalisée par Guillaume Comont, le mercredi 30 juillet 2014.
Merci à Vincent C. de nous avoir raconté ses premiers pas à Fort Boyard et de nous avoir ouvert les portes de son univers aussi original que surprenant.