France 2 se prononcera dans quelques mois sur l’avenir de l’émission
Publié le mardi 1er septembre 2009 par Audiences 2009.
dans la rubriqueComme chaque année, votre Webzine dresse le bilan de la saison qui s’achève en évoquant en détail les audiences réalisées par le jeu. Cette année, la baisse d’audience n’aura échappé à personne. Nous revenons avec vous sur cette contre-performance que personne n’avait vue venir... C’est bel et bien la plus grande surprise de cette saison 2009, mais on s’en serait volontiers passé. Car des surprises et des nouveautés, nous en aurons eu des bonnes cette année avec les dix primes habituels, le programme court et l’émission de best of diffusée pendant trois semaines en août. Malheureusement, comme vous aurez pu le constater, il a fallu que la sacro-sainte audience s’en mêle.
Cette année, les fidèles sont déçus, les téléspectateurs lambda tout autant et la chaîne aussi. Comment expliquer cette chute inattendue des audiences de l’émission, pourtant stables depuis 2003 ?
Le jeu avait pourtant commencé en fanfare cette année avec la venue annoncée et médiatisée de Tony Parker et son épouse américaine Eva Longoria, star d’une série mondialement connue diffusée chez la concurrence. 4,4 millions de téléspectateurs ont suivi cette première équipe de la saison, plaçant le Fort en tête devant TF1 qui diffusait un premier numéro de Qui veut gagner des millions ? avec, entre autres, le célèbre acteur Alain Delon. Cela représentait tout de même 25,6 % du public présent ce soir-là devant la télévision. Une performance remarquable et remarquée. Oui, mais voilà, on ne peut pas recevoir tous les jours Eva Longoria et son basketteur de mari... Et quand l’équipe est dégainée et diffusée fin juin, pour la première de la saison, la surprise est vite consommée. Pourtant, il faut encore assurer neuf autres épisodes pour clôturer la saison.
Les trois émissions suivantes ne feront pas autant, mais assureront à France 2 des scores honorables, en tout cas acceptables, grâce à la venue de Miss France 2009 et des Yamakasis (4 juillet), celle d’Arthur Jugnot et de Jospéhine Jobert (11 juillet) et enfin celle des anciens coureurs cyclistes Virenque et Jalabert (18 juillet). Les scores oscillent ainsi entre 3.2 et 3.3 millions.
Cela étant, la première grosse catastrophe de la saison a lieu la semaine suivante, le 25 juillet, quand le Fort reçoit les jeunes talents menés par Emma Daumas, M. Pokora et Mathieu Edward. Le Fort perd alors 700 000 téléspectateurs et n’intéresse que 15,9 % du public. Ce premier revers pourtant ne se poursuit pas la semaine suivante puisque France 2 a eu la bonne idée de placer la spéciale anciens animateurs de Fort Boyard le 1er août. Grâce à ce casting original composé de Patrice Laffont, Sophie Davant, Valérie Pascale, Jean-Pierre Castaldi et Sarah Lelouch, le Fort retrouve des couleurs et passe la barre des 3.5 millions de téléspectateurs, réussissant à capter 20,40 % du public et signant ainsi le deuxième meilleur score de la saison.
Mais ce dernier rayon de soleil est en quelque sorte le calme avant la tempête. Le point de non-retour allait arriver sans que rien ne puisse faire changer la donne jusqu’à la fin de la saison. Le 8 août, Julie Taton, la présentatrice actuelle du Loto de France 2, débarque sur le Fort avec quelques sportifs, assez peu médiatiques (mais non moins méritants) et les audiences s’en ressentent. Le Fort tombe à 2.2 millions de téléspectateurs pour 14.1 % de part d’audience. Les fidèles aussi sanctionnent cette émission, qui selon eux n’a pas été à la hauteur des espérances, l’équipe ayant tout juste rapporté 1 000 € de la Salle du Trésor après un parcours fort laborieux. La semaine suivante ne donne pas le change, cette fois les aficionados sont en colère suite au spectacle d’immaturité, voire d’insolence diront certains, qu’on offert les comédiens du film LOL, venus tenter leur chance sur le Fort pour l’occasion. Entre les échecs successifs et l’attitude « m’as-tu vu ? » de certains jeunes, c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. L’audience est selon eux à la mesure du spectacle édifiant auquel le téléspectateur a eu droit. Seuls 1,7 millions de téléspectateurs ont répondu présents (12,80 % du public). Les espoirs se tournent alors vers l’émission du 22 août dans laquelle s’illustreront Élodie Gossuin, Romain Mesnil et Fabien Pelous. Enchantés par cette émission, les fans considèrent cet épisode comme l’un des meilleurs de cette saison (ils lui attribueront la note moyenne de 17.7/20). Pourtant, l’audience ne remonte pas d’un pouce (1,9 millions de téléspectateurs) et pire, la part d’audience s’effondre complètement, atteignant son plus bas historique en 20 saisons de diffusion : 12,5 %.
Tous les visages se tournent alors vers le dernier espoir de cette saison 2009 : la venue de Patrick Poivre d’Arvor. Comment ce monstre de télévision, connu de tous, pourrait-il ne pas intéresser le grand public ? On se le demande encore aujourd’hui. Car si l’émission remonte un peu la pente, le résultat reste tout de même fort bas et en dessous de la moyenne de la chaîne : 2,7 millions de téléspectateurs ont eu la curiosité de suivre cet ultime numéro soit 15,7 % du public. L’espoir est perdu, la saison se termine brutalement et sans éclat. Notons d’ailleurs que certains numéros de cette saison 2009 ont réalisé des audiences en deçà de la moyenne de la chaîne, ce qui est finalement le plus alarmant, puisque la moyenne hebdomadaire de la chaîne n’atteint pas vraiment des sommets. Le Fort fait donc davantage baisser cette moyenne hebdomadaire qu’elle ne la fait augmenter.
La moyenne de cette saison 2009, malgré quelques bons résultats, traduit l’effondrement des audiences des derniers épisodes. La barre symbolique des 3 millions de fidèles ne sera pas atteinte cette année. Si l’année dernière l’émission avait réuni en moyenne 3,5 millions de téléspectateurs (20,63 % de part d’audience), elle devra cette année se contenter d’une moyenne estivale décevante s’élevant à 2 929 400 téléspectateurs et à 17,61 % de part d’audience soit une baisse de 500 000 téléspectateurs et de 3 points d’audience.
Pour ne rien arranger, les résultats des émissions de best of diffusées du lundi au vendredi à 17 h 50 entre le 3 août et le 28 août sont catastrophiques, même dans une case réputée difficile. Les téléspectateurs boudent les meilleurs moments de l’émission. Les épisodes réuniront au départ 8 % du public pour terminer en dessous de 5 % soit à peine 500 000 téléspectateurs chaque soir. Clairement, les 20 ans de l’émission laissent un goût amer à la chaîne qui n’avait pas prévu ces multiples revers que rien n’annonçait. À plusieurs reprises, Fort Boyard aura été dépassé par M6 et France 3, ce qui n’était jamais arrivé depuis six ans.
Mais comment expliquer cette baisse significative de l’audience du jeu ? Doit-on y voir un problème de casting ? On est en droit de se demander si des équipes comme celles de Julie Taton et des comédiens du film LOL intéressent suffisamment le grand public face aux célébrités de TF1, beaucoup plus connues. Il semble que les émissions à fort casting (Eva Longoria, les anciens animateurs, Miss France, Richard Virenque ou encore Patrick Poivre d’Arvor) ont plutôt bien fonctionné alors que celles composées de personnalités moins connues pour ne pas dire méconnues n’ont pas servi l’émission. Mais peut-on tenir le casting pour seul responsable ? Ce serait vite oublier que même TF1 n’obtient pas une moyenne estivale très haute cette année : 4 millions de moyenne sur les dix soirées de l’été pour 24,4 % de part d’audience. Certes, cette moyenne est correcte, mais montre à quel point la case horaire du samedi soir ne permet plus vraiment d’obtenir des audiences particulièrement hautes ; le beau temps et les vacances n’ont pas poussé le public devant la télévision. La plupart des réactions préconisent un retour des anonymes au sein des équipes avec une ou deux grandes célébrités à leur tête, ce qui formerait des équipes de quatre à cinq anonymes et d’une à deux célébrités (maximum). Chacun s’accorde à dire que les célébrités devront être particulièrement connues du grand public afin que tous les téléspectateurs y trouvent leur compte. Les anonymes devront être choisis au sein toutes les catégories de métier des Français avec par exemple des étudiants, des ingénieurs, des cuisiniers, des policiers, des commerciaux, des infirmiers, des médecins... Ils devront être particulièrement motivés et disposer d’au moins un candidat (voire deux) très sportif et endurant.
Toutefois, il serait bon de s’interroger également sur la mécanique de l’émission. Les fidèles sont formels, la baisse des audiences s’explique aussi par le manque d’ambiance et de mystère du jeu. Beaucoup reprochent au jeu d’être devenu trop rigide, trop carré (tout semble calculé au millimètre près, tous les épisodes semblent être les mêmes), pas assez spontané (les personnages par exemple ne surgissent plus de nulle part et ne se côtoient plus comme c’était le cas jusqu’en 2002), ne laissant place à aucune petite scène entre les personnages (devenus pour la majorité inexistants, comme La Boule, malheureusement porté disparu cette saison). Par ailleurs, les règles se sont complexifiées : auparavant, les candidats devaient trouver 7 clés pour ouvrir la grille de la Salle du Trésor, puis ils partaient au Conseil pour gagner du temps supplémentaire dans la Salle du Trésor avant de se lancer dans les aventures pour récupérer des indices permettant de trouver le mot code du jour et faire tomber les boyards. Aujourd’hui, le téléspectateur semble désarçonné par toutes les règles qui s’empilent et deviennent confuses (système des 5-6-7 clés, mises au conseil, coffret à boyards, cartouches ouvertes en fin de jeu...) et il devient parfois impatient. Beaucoup d’entre eux s’interrogent sur la pertinence de la partie intermédiaire, qui selon eux traîne en longueur et est répétitive, ce qui les pousse à changer de chaîne au moins le temps que cette partie se termine. Sans parler des cartouches qui ne peuvent plus être ouvertes en cours de partie, privant ainsi le téléspectateur d’une réflexion simultanée avec l’équipe. Bref, ce qui ressort de la majorité des avis c’est le manque de vie dans le Fort et le manque d’originalité des épisodes, qui devraient tous avoir une petite particularité, un côté singulier. De plus, certaines épreuves sont trop vues (« Smash », « Mal de mur », « Manolier »...) et d’autres, à l’inverse, pas du tout (« Sisyphe », « Mange-fil », « Tuyau transparent » (qui est pourtant votre épreuve historique préférée d’après notre sondage !)...). En outre, ce qu’attendent les téléspectateurs se résume en quelques mots : « Simplicité (pour les règles), variation (entre les épisodes pour les épreuves, les aventures et les défis) et originalité (scènes entre les personnages, vie dans le Fort...) ». Le retour de la « Lutte dans la Boue » et de la Lutteuse ainsi que celui de L’homme fort et de son « Cabestan » et « Bras de fer » est réclamé à corps et à cris, l’incompréhension quant à leur suppression du jeu est plus présente que jamais.
Passons maintenant à une autre hypothèse qui pourrait expliquer la baisse d’audience : la lassitude du téléspectateur après 20 années passées. Il est possible que cela joue, mais ce paramètre ne semble pas déterminant. Un jeu ne s’essouffle que si le téléspectateur n’y retrouve plus son compte, ne trouve plus d’intérêt particulier à suivre l’émission, ne vibre plus. Face à l’offre toujours grandissante des programmes télévisés (et a fortiori des émissions dites de télé-réalité), Fort Boyard peut sembler avoir trop vieilli. Si les enfants semblent toujours y trouver leur compte, il ne faut pas oublier que la ménagère de moins de cinquante ans et les personnes âgées doivent rester également des cibles privilégiées. Là encore, beaucoup reprochent à Fort Boyard de trop se focaliser sur un univers enfantin. Le rythme très soutenu, à la manière d’un jeu vidéo, empêche aujourd’hui les petits morceaux de vie et les fils rouges qui s’étendaient sur toute la saison entre les personnages et les animateurs. Dans ces conditions, le téléspectateur ne ressent pas le besoin de revenir chaque semaine, mais, au contraire, regarde chaque épisode comme un élément indépendant, il sait que dans l’émission suivante il n’aura pas forcément quelque chose à découvrir, il retrouvera parfois les même épreuves qu’il a déjà vues la semaine passée (faute d’une variation assez importante, due aussi à la diffusion dans le désordre des épisodes, à l’origine de nombreuses redites). En outre, les dix épisodes n’ont plus de lien entre eux et la fidélisation du public devient difficile. L’émission doit donc avoir des fils conducteurs et se renouveler. À ce prix, aucune lassitude ne sera possible. Le décor du Fort restera toujours mystérieux et unique et le téléspectateur ne devrait pas s’en lasser de si tôt. Le tout est donc de le mettre davantage en valeur et de le faire vivre. Aujourd’hui c’est à peine si on croit encore qu’il y a des habitants mystérieux dans ce Fort perdu au milieu de la mer alors qu’on y trouvait une Lumineuse sur la terrasse ou dans la Salle des Lumières auparavant, une Bohémienne à l’affût des candidats dans les coursives du Fort, et un Jaba cherchant à piéger La Boule.
Il convient également de s’interroger sur la case horaire du jeu. Certes, depuis 1994 Fort Boyard est diffusé le samedi, pour autant, cette case convient-elle toujours aujourd’hui ? On est en droit de se le demander. Pour commencer, le samedi n’est pas un jour évident pour fidéliser le public, il s’agit bien souvent d’un jour de sortie plus que d’un jour de télévision. De plus, bien souvent, ce jour est un jour de départ en vacances, ce qui n’améliore pas le taux d’écoute. Le samedi est traditionnellement le jour le plus dynamique dans les villes françaises : spectacles en plein air, concerts, représentations théâtrales... les Français s’amusent le samedi soir et sortent s’aérer avec leur famille, c’est un fait avéré quand on voit le faible nombre de téléspectateurs devant la télévision ces soirées-là et d’autant plus l’été pendant les grandes vacances. Enfin, Fort Boyard s’est retrouvé face à Qui veut gagner des millions ? à plusieurs reprises, il semble que cela soit au détriment du Fort qui joue un peu sur le même public que le jeu de TF1. Et à ce petit jeu, TF1 est plus forte : elle réunit très souvent des personnalités très connues et appréciées du grand public, ce que Fort Boyard ne parvient à faire qu’une ou deux fois au maximum dans une saison et de manière éparse. La meilleure des solutions serait donc de programmer Fort Boyard face à des films ou des séries, pour ne pas jouer sur le même tableau que les autres chaînes et pouvoir ainsi être le seul jeu de la soirée.
Dernière hypothèse, bien qu’elle soit peu probable, le rôle des animateurs. Si tout le monde s’accorde à dire qu’Anne-Gaëlle est parfaite dans ce rôle, il n’en est pas de même pour Olivier, qui, s’il est apprécié, doit pour une large majorité s’affirmer en Maître du Fort et ne plus être aussi gentil avec les candidats. Il doit, en bon Maître du Fort, défendre ce qui est « son Fort ». Bref, il doit accepter de revêtir complètement le masque de Maître avec tout ce que cela implique. Son attitude au Conseil est pour beaucoup la voie à suivre pour tout le reste de l’émission. Il doit inquiéter plus que rassurer, comme savait le faire l’animateur britannique dans la version anglaise du jeu et bien sûr ses prédécesseurs, Patrice Laffont et Jean-Pierre Castaldi (hormis ses exagérations commises en 2002). Les fidèles ont confiance en lui et savent que cette évolution, qui sera profitable au jeu, est possible.
Nous avons ainsi fait un tour d’horizon assez large des éléments qui pourraient expliquer cette baisse d’audience et cela restera notre modeste contribution à ce débat, mais si cela peut aider les décisionnaires, alors nous en serons ravis. C’est maintenant à France Télévisions de se pencher sur l’avenir de l’émission. Patrick de Carolis a d’ores et déjà annoncé la tenue d’une enquête de qualité pour comprendre pourquoi les trois jeux historiques (Intervilles, La Carte au Trésor et Fort Boyard) ont connu une telle érosion d’audience cette année. Dans trois mois, France 2 et France 3 trancheront quant à la poursuite ou non des diffusions de ces programmes sur leur antenne et nous connaîtrons ainsi les aménagements et modifications éventuelles que cela entraînera. À l’heure actuelle, si l’avenir de La Carte au Trésor semble des plus pessimistes, celui de Fort Boyard semble moins inquiétant, mais la chaîne a conscience qu’elle devra opérer des changements si elle souhaite reconquérir un public large et familial, c’est-à-dire le public traditionnel de Fort Boyard qui aujourd’hui s’est étiolé. La cible des 4-14 ans ne peut plus suffire à elle seule.
Fort Bavard, dans l’attente des décisions de la chaîne, suivra bien sûr d’un œil attentif ces questions et ne manquera pas de vous donner de nouveaux éléments au fur et à mesure des déclarations et communications de la chaîne et de ses dirigeants.
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